Un an et demi après l’amendement autorisant la résiliation annuelle de l’assurance des prêts immobiliers, son auteur a constaté que les Français peinaient à faire jouer la concurrence. La faute à des banques qui « ont capturé l’argent de ces assurances ».

La baisse historique des taux de crédit immobilier peut aussi cacher de mauvaises surprises.

Lorsqu’un particulier souscrit ou détient un prêt, il (re)négocie en priorité le taux d’emprunt et néglige souvent le taux de l’assurance. Mais plus les taux sont bas, plus la part que représente l’assurance emprunteur dans le coût total du crédit est élevée: elle est estimée à 25% en moyenne par Praeconis, courtier spécialisé en assurance de personnes. Ce chiffre peut grimper jusqu’à 40% selon les dossiers. Preuve que les marges de négociation sont très importantes. «Un tiers de ménages ont un prêt immobilier et 80% d’entre eux disposent encore d’une assurance souscrite auprès de la banque, c’est effectivement pour nous un marché très important», a déclaré Loïc Biver, président de Praeconis.

Prenons l’exemple d’un couple de 35 ans qui emprunte 300.000 euros pour l’achat d’une résidence principale sur 20 ans au taux fixe de 0,95% (hors assurance). Si le ménage choisit l’assurance proposée par sa banque, son coût représenterait 23% du coût total de l’emprunt, selon Credixia, courtier en crédit immobilier. Et seulement 9% s’ils optent pour une assurance déléguée. Ce qui équivaut à une économie de 6000 euros sur la durée du crédit, soit 25 euros par mois. «Un emprunteur âgé d’une quarantaine d’années peut espérer entre 6 et 10.000 euros d’économies sur la durée du crédit. Elles peuvent grimper jusqu’à 15.000 euros pour un trentenaire», explique Astrid Cousin de Magnolia, distributeur en assurance emprunteur.

Les associations de consommateurs et certains assureurs estiment que les banques ne jouent pas le jeu de la concurrence.

La faute à des décrets d’application peu clairs, selon le sénateur PS Martial Bourquin, l’auteur de l’amendement, notamment sur la date anniversaire. Pour l’élu du Doubs, la date à retenir doit être celle de la signature de l’offre de prêt. Ce que le sénateur a consigné dans une proposition de loi déposée en avril dernier. Le texte prévoit également d’appliquer les sanctions prévues par la direction de la répression des fraudes (1500 euros d’amende) à l’encontre des banques réticentes et de les rendre publiques.

La proposition de loi est restée lettre morte à ce jour. Si sa proposition n’est pas votée rapidement, Martial Bourquin envisage de déposer des amendements pour la prochaine loi de finances. «Le secteur bancaire a capturé l’argent de ces assurances qui sont à des prix prohibitifs, voire scandaleux parfois, affirme-t-il. Les banques doivent rendre aux Français trois milliards d’euros de pouvoir d’achat. Le gouvernement doit prendre la défense des Français».

Par Guillaume Errard
Publié le 21 Juin 2019 à 06:00
« Le Figaro »